Dr. Pierre Hirel

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Andrew Robinson : "The last man who knew everything..."
Oneworld Publications (2006)

"...Thomas Young, the anonymous polymath who proved Newton wrong, explained how we see, cured the sick, and deciphered the Rosetta stone". Le titre exagérément long de ce bouquin n'est qu'un maigre aperçu de la variété de sujets que Thomas Young a abordés au cours de sa vie.

Thomas Young (1773-1829) a laissé son nom à plusieurs outils importants en physique : le module d'Young très utilisé en matériaux et ingénierie ; et l'expérience des "fentes d'Young" qui mit en avant la nature ondulatoire de la lumière (s'opposant à la théorie corpusculaire de Newton), et qui sera reprise au début du XXe siècle pour montrer que les particules subatomiques peuvent également agir comme des ondes.

Young a suivi une formation de médecin, et a officié comme tel une bonne partie de sa vie. Il a été l'un des premiers à expliquer comment l'oeil pouvait accomoder -c'est-à-dire nous permettre de voir aussi distinctement un objet proche qu'un objet lointain-, et a également travaillé sur les défauts de la vision -il a été le premier à expliquer l'astigmatisme. Il a également proposé que l'oeil distinguait les couleurs grâce à seulement trois "capteurs" différents -largement en avance sur son temps puisque ceci n'a été confirmé qu'en 1959. Young a réalisé d'importants travaux en optique, et a été le premier à proposer (en collaboration avec Fresnel) que la lumière était une onde transverse (et non longitudinale comme les ondes sonores), expliquant ainsi les différentes polarisations de la lumière et portant un sérieux coup à la théorie corpusculaire.

Très tôt attiré par les langues -à 14 ans il parlait parfaitement anglais, français, italien, latin, grec, hébreu, et une demi-douzaines d'autres langues- Young prit une part immense dans le déchiffrage des hyéroglyphes, plusieurs années avant Champollion -certains égyptologues aujourd'hui considèrent Young comme l'initiateur de leur domaine. Il effectua également un travail de comparaison de plusieurs centaines de langues, allant de l'ancien égyptien jusqu'au chinois, pour les regrouper en familles -c'est lui qui créa le néologisme "langues indo-européennes".

Dans cette biographie, l'auteur a su replacer l'histoire de Young dans son contexte historique, rappelant les relations entre pays voisins, les théories en vogue à l'époque et leurs évolutions -ajoutant ainsi un très intéressant point de vue d'historien des sciences. A. Robinson offre là un travail richement documenté, très bien réalisé et ordonné (malgré la difficulté de traiter un sujet aussi versatile !), et rend un hommage imposant à T. Young, sans doute le dernier homme à avoir atteint une telle érudition dans tant de domaines différents.

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